lundi 10 novembre 2025

Burkina : Le gouvernement augmente le capital de la SOSUCO à 11,6 milliards FCFA pour consolider sa reprise

Réuni en sa séance ordinaire du jeudi 16 octobre 2025, le Conseil des ministres a adopté deux décrets majeurs relatifs à la Nouvelle Société sucrière de la Comoé (SN SOSUCO), marquant une nouvelle étape dans le processus de réappropriation nationale de cette entreprise stratégique installée à Banfora, dans la région des Cascades.

Le premier décret porte sur le changement de dénomination, la redéfinition de l’objet social et l’augmentation du capital de la société. La « Nouvelle Société sucrière de la Comoé » (SN SOSUCO) reprend ainsi son appellation d’origine, devenant officiellement la Société sucrière de la Comoé (SOSUCO). Dans le même mouvement, le gouvernement procède à l’augmentation du capital social de l’entreprise, par souscription en numéraires de 349 011 nouvelles actions de 10 000 F CFA chacune, portant le capital total à 11,6 milliards FCFA.

La répartition de ce capital consacre une participation publique majoritaire, avec 70 % détenus par l’État burkinabè, soit 8,143 milliards FCFA, et 30 % par le secteur privé, pour 3,49 milliards FCFA. Selon le compte rendu du Conseil, cette mesure « permet l’opérationnalisation de la SOSUCO en tant que société d’économie mixte à participation publique majoritaire ».

Le second décret adopté concerne l’approbation des statuts de la nouvelle entité. Il vise à doter la société de textes réglementaires conformes à la loi n°025/99/AN du 16 novembre 1999 relative aux sociétés à capitaux publics, afin de garantir sa pleine capacité d’action et sa gouvernance en cohérence avec les objectifs de politique industrielle nationale.

SOSUCO : un retour progressif sous contrôle de l’État

Ces décisions s’inscrivent dans la continuité de la démarche engagée par le gouvernement burkinabè depuis septembre 2025 pour reprendre le contrôle total de la désormais « SOSUCO ». Le 18 septembre 2025, un décret avait déjà été adopté en Conseil des ministres pour entériner l’expropriation des actionnaires minoritaires restants, actant ainsi le transfert intégral des titres au profit de l’État.

Cette opération faisait suite au rachat des parts du groupe SUCRE PARTICIPATION, ancien actionnaire majoritaire avec 69 % du capital, par lequel l’État est redevenu le principal détenteur de la société. Le processus de reprise a ensuite concerné les 1 824 actions détenues par 45 actionnaires minoritaires. Parmi eux, huit avaient accepté l’offre publique de rachat, représentant 1 519 actions, dont une acquise à titre gratuit. Les 37 actionnaires restants, détenteurs de 305 actions, n’ayant pas répondu à l’offre, ont été expropriés conformément au décret adopté le mois dernier.

La SOSUCO, pilier de l’industrie agroalimentaire nationale, demeure un acteur essentiel du développement économique de la région des Cascades ainsi que du Burkina. Son activité couvre toute la chaîne de valeur sucrière : de la culture de la canne à sucre à la production de sucre blond et raffiné, en passant par le conditionnement et la commercialisation sur les marchés local et international. L’entreprise valorise également ses sous-produits, notamment à travers la production d’alcool pharmaceutique à base de mélasse.

De la création à la renationalisation : 60 ans d’histoire

Créée en 1965, à la veille des indépendances africaines, la société est née sous l’appellation Société d’Études Sucrières de Haute-Volta (SESUHV), avec pour partenaires le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et la SOMDIAA (Société d’Organisation, de Management et de Développement des Industries Alimentaires et Agricoles). Son capital initial s’élevait alors à 100 millions FCFA, avant de connaître plusieurs hausses : 1,83 milliard en 1972, 1,97 milliard en 1973 et 3,12 milliards en 1975.

Le tournant majeur est intervenu sous la Révolution d’août 1983, avec une nouvelle augmentation du capital à 6,03 milliards FCFA et un changement de dénomination : la société devient Société sucrière de la Comoé (SOSUCO) en 1984.

En 1998, l’entreprise est privatisée et reprise par le groupe IPS/West Africa du réseau Aga Khan, via la holding SUCRE PARTICIPATION, qui obtient 52 % du capital. La société adopte alors la dénomination Nouvelle Société sucrière de la Comoé (SN SOSUCO). Au fil des ans, la structure du capital évolue : le retrait de l’État ivoirien en 2016, qui détenait 2,2 %, renforce la position du groupe Aga Khan, dont la part atteint 68% après une augmentation de capital à 8,1 milliards FCFA en 2014.

Avec la reprise intégrale du capital et la restructuration juridique désormais actée, l’État burkinabè entend redonner un second souffle à la filière sucrière nationale et assurer l’autosuffisance du pays en sucre. Dans un contexte où la souveraineté économique et alimentaire constitue une priorité gouvernementale, la SOSUCO rénovée s’impose comme un levier stratégique pour le développement industriel et la sécurité alimentaire du Burkina Faso.

Par Léon Yougbaré

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